Dans lequel il est prouvé que Philleas Fogg n'a rien gagné à faire ce tour du monde, si ce n'est le bonheur.
-  Jules Verne
 
     
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Notes Birmanie

Note 77 Birmanie (Myanmar)
  "Vous saviez qu’en Birmanie, on vous condamne à 7 ans de prison pour avoir dit une plaisanterie. Essayez d’imaginer la vie du comique birman Pa Par Ley la prochaine fois que vous sortez une blague." - About a Boy, avec Hugh Grant, scène du call center Amesty International

* la photo: Aung San Suu Kyi et Pa Par Ley

28.04.2005- 25.05.2005 Je ne pensais pas aller en Birmanie, dans ce pays les mots "juste", "droit", "justice" ont été rayés du vocabulaire. Aung San Suu Kyi, Prix Nobel de la Paix 1991 et leader de l’opposition, détenue en résidence surveillée, demande aux touristes de ne pas venir en Birmanie, demande relayée par Amnesty International, l’Association Birmanie file:///D:/My%20doc/www.birmanie.ch, Burma campaign www.burmacampaign.org.uk/imnotgoingpledges.htm ... La junte militaire au pouvoir recourt au travail forcé pour construire des hôtels, des villages sont déplacés pour aménager les sites touristiques ou pour éviter que les habitants n’entrent en contact avec les touristes (p.ex. Bagan).

J’ai tourné autour de la Birmanie pendant des mois, sans y entrer. Et pdt ce temps là, les voyageurs que je rencontrais enfonçaient le clou "c’est le + beau pays du monde. Les gens sont adorables". De +, le boycott ne s'applique pas aux voyageurs qui ne vont pas dans les hôtels d’état mais chez l'habitant, qui utilisent les Cies de bus privées et non les tour operator dont les militaires tirent les bénefs. Et, finalement, je suis vraiment contente d’y être allée. Les contacts avec les étrangers sont un des moyens pour la population de s’informer de ce qui se passe à l’extérieur et également de communiquer avec l’extérieur. Et les gens sont d’une gentillesse extraordinaire et le pays spectaculaire.

28.04.2005 Rangoon Il est dorénavant possible d'obtenir des visas de 28 jours pour la Birmanie mais, si on voyage en indépendant, il est difficile et aléatoire de passer les frontières par la route. Je prends donc l'avion de Bangkok à Rangoon. Mon sac à dos n'est pas à l'arrivée, au moment je m'attendais le moins à le perdre. Moi qui pensais voyager de façon bouddhiste (bien que bien que... j'ai vu des moines un portable à l'oreille, des moines en Nike ou avec une toquante blinquante, des moines en Ray Ban...) détachée des choses matérielles, je compte mes saris évanouis et mes chapeaux pointus perdus.

Les journées sont très, très chaudes. Dans qq jours, la mousson s'abattra sur le pays. On est à cette période de l'année tout tourne au ralenti, écrasé par la chaleur. A la White House, les pales du ventilateur tentent poussivement de couper la température (42 degrés) de la chambre qu'on partage entre Kim (Can), Yumiko (Japon) et moi. On décide de s'installer dans le dortoir de 20 lits (mais on est que 3), grand comme une salle de basket, ventilé par un moteur d'avion. Du toit, on voit le majestueux hti en or de la pagode Schwedagon, + grande que dans l'imagination, flottant au-dessus de Rangoon, étincelant sous la lumière du crépuscule. Des moines étalent feuille d'or sur feuille d'or. De l'autre coté, les quais de la Rangoon accostent les bateaux qui versent et chargent le teck. Dans le quartier entre les bâtiments autrefois somptueux, aujourd'hui décadents du Strand, et le Scott Market, les gens me font penser à l'Inde, des gens très maigres qui portent le longhi, les dents rouges de bétel, les femmes qui balaient les rues courbées en 2, pieds nus. Les Britanniques les avaient amenés travailler sur les quais, tirer les pousse-pousse, faire les sales boulots que les Birmans qui ne mouraient pas de faim refusaient d'accomplir. Non loin, la pagode Sule se dresse au centre des embouteillages. Tout modernisme est à des années lumière d'ici.

Bangkok Airways a finalement retrouvé mon sac à Luang Prabang (Laos), confousione! En attendant, je dois encore manger 2 X l'incroyable ptit déj-buffet-eat as much as U can-spécialités birmanes. Ceux qui bouclent leur tour en Birmanie conseillent ceux qui y arrivent, "ne pas faire trop d'étapes, les routes sont éprouvantes, ne pas manquer Hsipaw, prendre le bateau sur l'Irrawaddy,..."' Qq nous dit qu'une bombe aurait explosé au marché de Mandalay faisant 2 morts mais on ne sait pas plus. Le journal The New Light of Myanmar est contrôlé par l'état et ne diffuse aucun détail. Le soir, on se rafraîchit en suçant des glaces chez Mi Mi Lay, chocolat pour Kim, fraise pour Yumiko, pistache pour moi... Charlie's Angels?

A lire: "Le palais des miroirs", Amitav Gosh, Points: une "maison aux esprits" orientale, 3 générations qui se partagent entre la Birmanie, l'Inde et la Malaisie. 

A suivre...


Note 78 Birmanie/ Bagan ...d'ici et de là-bas

Mingala ba,

Ou "bonjour" en birman. Comme minga une expression d'amon nos aut' et là-bas. Mais c'est d'ici de Liège que je vous écris. Je suis rentrée pour danser le grand jojo avec mes vieux potes et profiter de ce qu'il me reste d'amies et d'amis. Et c'est une curieuse sensation que de se donner RV dans des lieux comme "chez Gibert Jeune" ou "Place-Cat-devant-chez-Casa" (qui a déménagé entretemps, tout fout le camps) alors que j'arrive d'endroits inconnus en ayant voyagé plusieurs mois et pris des chemins si différents. Et mi/ti hotelito? et le retour? ... Je vous raconte ... à suivre.

01.05.2005 Bagan J1 Arrivée aux aurores à Nyaung-Oo après une nuit de route. Le soleil dessine une jolie auréole à la pagode Schwezigon. J'enfourche un vélo pour visiter Old Bagan avant que la chaleur ne se transforme en chape de plomb.

Bagan, 8e merveille du monde, patrimoine Unesco, un des + importants sites archéologiques bouddhistes dans un pays tout entier dédié à Bouddha. Une plaine hérissée de milliers de pagodons, de temples imposants, de hti dorés avec des clochettes qui tintent dans le vent. Il y a eu près de 13.000 pagodes construites jusqu'au 14e siècle sur une superficie de 40 km2. Actuellement, il en reste encore environ 2000. Si on sait qu'édifier une pagode peut aider à ne pas être réincarné en rat ou en grenouille, on se dit qu'ils sont qq1 à avoir du racheter leurs méfaits par un stock de mérites. Pour les budgets réduits ou les petits péchés, ça peut marcher aussi en achetant des poissons rouges pour les rejeter dans les rivières, ou en libérant un moineau, ou en faisant des offrandes de riz aux moines, ou en recouvrant les fesses de bouddha de feuilles d'or.

Du haut de la pagode Schwesandaw, vue d'ensemble du site perdu au milieu d'un désert de sable rouge orange qui s'étire le long du fleuve Irrawaddy. Depuis qq jours, les militaires ont inauguré une tour de 60m et ont fermé l'accès à une série de temples, dont la fameuse pagode Mingalazedi. En 90, la population de Bagan a été délocalisée par la junte, leurs maisons ont été rasées pour aménager le site touristique. Il ne reste dans l'enceinte que les temples, les arbres, le sable et qq hôtels de luxe.

J2 Pas de 2CV ici mais une carriole à cheval, couverte et améliorée de moelleux coussins. Mon guide m'emmène découvrir des temples cachés de la route. Les gardiens, sur un air de confidence, éclairent des fresques avec leur lampe de poche ou m'indiquent qu'il faut prendre tel escalier dérobé pour arriver tout en haut et avoir la meilleure vue du site. Ces détenteurs des clés vendent leur peinture ou les pots en laque décorée, et ici avec une douceur tout sourire, en vous invitant à partager leur repas, en prenant le temps d'une discussion avec vous. C'est la basse, basse, très basse saison et certains n'ont gagné, me disent-ils, que 3 $ en 5 jours. Et je me plonge dans mes réflexions en me demandant si la population doit être responsable de son gouvernement, de + non élu.

J3 et J4 Les jours qui suivent, je me perds à vélo aux heures les moins chaudes dans la campagne environnante, dans les rues de Nyaungg-Oo, au marché. Je croise ces visages aux joues bariolées de tanaka, une pâte de bois râpé qui sert de maquillage et de crème solaire. Je retourne en haut des temples photographier des couchers de soleil dans des ciels torturés par les orages de mousson.

Pour lire au bord de la piscine du Bagan hotel http://www.bagan-hotel.com/: Une histoire birmane, de Georges Orwell, 10/18
Pour manger:
Mar lar Thein Gi Buffet birman dans Old Bagan près de la porte de Sarabha
Il n'y a pas de carte. Le patron me propose le buffet
à 1500 Kiats (1,5$). A ma surprise, TOUT le buffet est servi à table, 17 petits plats présentés comme des salades marocaines. Une soupe, le riz, l'assiette de tohzaya, assortiment de mangues vertes, concombres et de pousses de bambou plongés dans le nganpyaye + des currys d'aubergines, de ladies finger, une salade de tomates-oignons-coriandre, de tamarin, de thé vert, des patates douces, du soja, du potiron, des lentilles, des currys de poisson, de poulet, de mouton, du poulet frit, une friture de petits poissons...  + les desserts, des graines de papaye frites et des bananes! Un régal à volonté ...

Catherine, 5 mai 2005, Golden Village Inn, Nyaung Oo 


Note 79 Birmanie: sur le fleuve Irrawaddy

06.05.2005 Remontée du fleuve Irrawaddy de Bagan à Mandalay Le bateau lève l'ancre avec le lever du soleil. La lumière caresse le fleuve et s'insinue entre les pagodes de Bagan qu'on laisse derrière nous. Clic clac et un cliché de + pour la médaille d'or, titre déjà convoité par le Shangri-La (Chine) et Baja California (Mexique). Le même soleil, vu d'angles différents.

Bagan Shangri-La Baja California

A Pakkoku, les locaux descendent. On n'est plus que 3 à bord d'un ferry pour touristes d'un coup trop grand pour nous. Sur les fauteuils bleus électriques, beaux comme ceux des jetfoils Ostende-Douvres, la vingtaine de membres d'équipage tue le temps en se poilant devant des Charlie Chaplin, quand ils ne trafiquent pas l'excédent (enfin, j'espère...) de l'essence. On se régale devant la danse des petits pains et l'intégrale coffret-cadeau Charlot, "L'Émigrant", "la Ruée vers l'or", "le Kid", "le Pèlerin", "le Dictateur" (de circonstance), "les Temps Modernes" un peu moins de circonstance, quoique ... hors du temps, les berges de l'Irrawaddy en terre battue. Les hommes courbés par le poids de sacs montent et descendent mécaniquement des planches en bois en équilibre instable. Des coolies tirent les embarcations au moyen de cordages le long de la rive.
Avant d'arriver
à Mandalay, le bateau longe la belle et tranquille Sagaing, lovée dans les montagnes, semée de milliers de pagodes blanches et de monastères, lieu de retraite pour les fervents Birmans.


 

Note 80 Birmanie: Mandalay Royale

07.05.2005 Les rues fendent l'ancienne cité royale comme des lignes infinies et mènent jusqu'aux murailles rouge brique du Fort et aux lointaines pagodes de la colline de Mandalay, brillant sur la pente comme une rangée de cloches blanches. Le Fort se révèle dans toute son immensité, avec ses murs longs de 2km. Mais de l'autre côté du pont, derrière les lourdes palissades, le + gros est en ruine, le palais a été détruit, les pavillons incendiés. J'imagine des histoires. Celles des appartements en teck du dernier roi de Birmanie, Thebaw, avant son exil forcé vers l'Inde et de la reine Supalayat, connue pour avoir fait massacrer les 79 princes rivaux du roi, battus à mort emballés dans des tapis pour éviter de faire couler le sang. On raconte que le + gros rubis du monde, le Nga Mauka, servait de boucle d'oreille à l'éléphant blanc sacré du roi. Il a disparu avec l'arrivée des Anglais... Je longe les douves à pied, qui sait ... cela ferait une jolie paire de B.O. Je suis arrêtée par un quidam qui me pose une déferlante de questions dignes d'un espion de l'État, moi une naïve touriste. 4km + loin et 1700 marches + haut, j'atteins le sommet de la colline qui surplombe la "Cité d'Or". Les astrologues népalais sont installés dans les escaliers du temple sous des banderoles ésotériques et lisent dans les lignes de la main. Mais je n'ai pas envie de savoir ce qui va m'arriver.

Moustache Brothers # 39th Street, entre #80 et #81, la maison des frères Moustache. Même si Pa Par Ley l'a rasée après avoir pris 7 ans de travaux forcés pour propos politiquement incorrects. Il ne fait pas bon raconter des blagues blondes sur le gouvernement en Birmanie. Show must go on, Lu Maw, le cadet, a continué le spectacle dans leur maison avec le reste de la troupe familiale. Sa femme, cover girl (la fille de la couverture du Lonely Planet Italie), danse le pwe pendant qu'il fait son Guignol de l'Info en brocardant la corruption, la police, les militaires, la dévaluation monétaire, le port du longhi, la polygamie, et les pipole US vu(e)s à la télé. Partout des photos d'Aung San Suu Kyi qui est venue ici en 2002.
YYY Spectacle à 20.30h, venir 1h + tôt pour parler avec Lu Maw de leur combat, lire les coupures de presse, admirer les marionnettes anciennes, fumer un cheerot, ....

09.05.2005 Je loue un vieux vélo déglingué à la selle branlante montée sur de gros ressorts grinçants. Pourtant un coup de pédale et me voila véloportée au temple Mahamuni. Il y règne une ferveur électrique, les hommes collent des feuilles d'or sur un bouddha boursouflé, alors que les femmes le vénèrent derrière les fleurs qui les maintiennent à distance. Un autre coup de pédale, je passe entre une armée de bouddhas géants que les sculpteurs entreposent le long de la route d'Amarapura. Je prends les voies champêtres, me perds dans un village et me retrouve nez à trompe avec un éléphant domestique.

Catherine, 9 mai 2005, Royal GH, Mandalay

Mingun
La + grande cloche
du monde
Mingun
Gréement patchwork pour
Optimist
Amarapura Pont U Bein
Le + grand pont du monde en teck
En couverture du "Palais des Miroirs" A. Gosh

Note 81 Birmanie: Microcosme roulant

10.05.2005 Mandalay-Hsipaw Un petit tortillard. 12 heures pour 130km. Des planches en bois qui nous rentrent dans les fesses, mon voisin tente de les faire rentrer à grands coups de tongs. En face, un jeune moine qui ne peut pas toucher une femme alors qu'on est aussi emboîtés que les pièces d'un puzzle. En biais, un chiqueur de bétel qui crache son jus rouge par la fenêtre. Ceci me fait réfléchir sur ma fascination pour les destins éphémères qui s’entrecroisent dans les compartiments d’un train. La ligne grimpe vers Pyin U Lwin en direction du far far east jusqu'à la dernière ville avant la frontière chinoise, Lashio. On traverse les paysages les + extraordinaires, les rails frôlent les parois vertes de la montagne et passent au milieu des villages. Le train doit reculer, exercer des mouvements pendulaires pour franchir les collines escarpées et ensuite descend en dessinant un grand S jusqu'au viaduc de Gogteik. On attend que le seul convoi de la journée en sens inverse passe sur l'unique voie de ce pont en fer construit en 1900 par les Anglais qui surplombe à 300m des rocs effilés et l'abîme de la jungle. Les locaux me disent de ne pas prendre de photos. Motif invoqué: le gouvernement ne veut pas que l'on puisse constater l'état de délabrement du viaduc. Voila qui est rassurant!  A chaque arrêt, c'est l'animation des marchands ambulants, les vendeuses de riz, d'ananas, de fleurs, de thé, d'eau, maïs, boulettes, ... et il y aussi les bonimenteurs qui passent dans les wagons, incantant comme des prêtres évangélisateurs. Ils nous font sentir des morceaux de teck (menthe), goûter une sorte de prune séchée ou une poudre de la couleur du poivre au goût de poisson, le tout aux effets médicinaux bénéfiques. 


 

Note 82 Birmanie: Hsipaw Twillight over Burma

11.05.2005 Hsipaw Bien loin des sentiers battus, Hsipaw se trouve au coeur de l'état Shan, territoire longtemps interdit. Coté face, une région rurale tranquille, coté pile, une zone d'opposition des + activistes. Le terrain de foot a d'ailleurs été réquisitionné ce matin par la junte pour un "meeting populaire spontané", un "rassemblement contre le terrorisme", me chuchote mon guide. Il y a qq semaines, un des Princes Shan réfugié à l'étranger a fait une déclaration d'indépendance de l'état Shan. Et ce WE, 3 bombes ont explosé au marché et dans des centres commerciaux à Rangoon. Que s'est-il passé? Personne ne sait vraiment. La peur ambiante qui règne dans le pays fait taire les témoins, les autorités appliquent la loi du silence. Des rares informations ayant filtrés, 11 personnes seraient mortes, bcp plus selon certains (+ d'info, Reporters sans frontières, Black-out et manipulation de l’information sur les attentats de Rangoon). Il faudra que j'envoie un mail de Mandalay pour dire que je suis toujours bien vivante.

La maison de Mr Charles Mr Charles, un chinois aux yeux cachés derrière des lunettes Police noires, avec 3 grands poils sur le menton vient vous cueillir à la gare. Sa GH est un incontournable à Hsipaw, une maison traditionnelle en teck, avec une terrasse communautaire on se partage des bières Mandalay bleues ou rouges (les + fortes) en contemplant la campagne environnante et l'horrible construction chinoise tape-à-l'oeil en vis-à-vis. Le matin, bon pied bon oeil, il emmène les touristes à travers les campagnes Shan. Il est connu comme Barabbas. On rencontre pleins de gens sympas, avec qui on boit du thé et on mange des croustillons. Après ça, on ne peut pas refuser un p'tit cheerot (cigare) local, vraiment ça se ferait pas... Et on discute de tas de trucs comme par exemple... les attentats du WE ou le sida qui décime la population. Ici, les paysans vendent leur sang à des fonctionnaires corrompus. La mort au menu quotidien.

Le Palais Shan Miss Princesse, fille du Prince de Taunggy, nous consacre 2 heures à raconter l'histoire romantique et dramatique du Prince de Hsipaw, disparu mystérieusement lors de l'arrivée au pouvoir en 1962 du dictateur Nu Win. Son épouse autrichienne lui a consacré un livre, Twillight over Burma. Miss Princesse remplace son mari qui reçoit depuis des années les touristes dans ce Palais à l'architecture inspirée des manoirs et des villas européennes. Ils tiennent un petit musée. Et elle nous demande de lui faire parvenir des magazines, elle nous dit que les touristes sont pour eux un moyen de garder le contact avec l'extérieur. Mais comment font-ils pour ne pas se mettre en porte-à-faux avec le gouvernement? A croire que c'est de la haute voltige. Très vraisemblablement, la Police sait qui vient au Palais et "flique" les touristes. Pourtant, son mari a été arrêté au cours de ce mois d'août par la Police.

Et tous les autres Les bonzesses en robe rose, Mr Book qui tient la librairie, Mr Bamboo qui fait des chapeaux en ... bambou, Mr Noodles on peut trouver le riz collant pour le ptit déj et Mister Bean (qui collectionne les photos de son frère anglais) qui prépare des salades de feuilles de thé à l'intérieur du marché, une adorable dame qui vend des graines de tomate pour la collection d'un ami de Béné, les ptits gars qui nous font goûter du whisky shan (Anghiet) de la bière rose au goût de fraises (Cauhiet) et une grande pipe à eau.

Catherine, le 14 mai 2005.


Note 83 Birmanie: Trek Kalaw-Lac Inle ... Dans ma prochaine vie, je voudrais naître en Birmanie

Je ne suis pas peu contente d'arriver à Kalaw, ancienne villégiature anglaise. Après 10 heures d'un bus antique, 4 heures de tournants, des à-pics vertigineux, à 2 sur un siège pour 1, les genoux dans les dents, les pieds sur des bidons d'essence et des voisins fumant comme des fous qui vont bientôt nous envoyer en fusée Ariane. Le volant est à droite of course (vestige anglais?) ... et le hic c'est qu'ils roulent aussi à droite (politique birmane?) !!!

David, un californien rencontré à Hsipaw m'a indiqué d'aller au marché pour trouver une agence de trekking. Mr K. va me servir de guide pour découvrir la Birmanie profonde au cours de 3 jours de randonnée entre Kalaw et le Lac Inle (1300-1600 m). Il est ancien militaire, très attentif "Mrs Catherine, I bought vegetables for U", curieux de nos habitudes "Mrs Catherine, est-ce habituel dans votre culture que les filles dorment en petite culotte?". Je crois qu'il veut s'assurer diplomatiquement que je ne vais pas me désaper dans les monastères, comme cela lui est arrivé avec des australiennes olé olé. Il a 53 ans, parle anglais couramment, a 4 enfants dont 2 travaillent à l'étranger, en Malaisie.

J1 C'est parti pour des heures de marche, mon sac n'est pas trop lourd,  mes affaires sont expédiées au Lac Inle directement. Les chemins parcourent les forêts, rizières, champs de thé, de gingembre et les cultures narcotiques. On rencontre bon nombre de paysans de la tribu Palaung, des femmes et hommes transportant des produits pour le marché. A chaque sommet, un temple, des pagodes et des moines. Thé et marrons glacés chez ce lama tatoué... On s'arrête dans les monastères Mr K prépare à manger une bonne platée militaire de sa spécialité riz-lentilles avec des frites mmmm...!
"Mrs Catherine, our nice stop". On passe la nuit dans une famille. Le mari est parti travailler dans la construction pour gagner 1 $/jour!!!! L'épouse et ses 4 enfants au T-Shirt déchiré et au longhi troué élèvent qq animaux, 2 vaches et un cheptel de poules. Moi qui n'avale plus de poulet depuis des mois pour cause de peste aviaire ôcasou (bien que je ne sais pas toujours ce que je mange ...). Et qu'on me répète que ce n'est pas le poulet cuit qui est dangereux mais le vivant. Et voilà face à moi, perchés sur le bambou de la terrasse, un rassemblement non autorisé de volatiles qui volaillent à qui mieux mieux et leurs petits qui leur chatouillent les plumes qu'elles secouent dans tous les sens! Je suis terrorisée.

J2 Ça y est, on est arrivé en haut. On se dit, que vu la vue, ça valait (pas le jeu de mot ...) le coup. Un des moines monte jusqu'au point culminant avec moi parce que ma montre indique l'altitude, là où personne ne va jamais entre statues protégées et rocs sacrés. Il note consciencieusement dans son calepin: 1625m. On admire le coucher de sa majesté... Dans ma prochaine vie, je voudrais naître en Birmanie et être moine pour vivre dans une maison en hauteur tout en teck, protégée par une forêt de bambous frémissants et me laisser à contempler sans fin le panorama à 360 degrés. C'est le nirvana.

Il n'y a pas l'électricité, de petites bougies sont allumées tout autour de l'unique pièce. Mais un groupe électrogène fait fonctionner une télévision dont l'antenne trône au milieu des bouddhas. Une 20aine de novices sont assis dans le noir devant un film ... Cette musique et ce décompte à rebours me rappellent qqchose? C'est la série 24 heures Chrono ou plutôt le remake chinois noir et blanc sous-titré en birman. Le moment le + surréaliste de mon voyage.

J3 Mr K allume sa petite radio et colle son oreille au programme birman diffusé par la BBC. Les Etats-Unis ont renouvellé leur embargo de la Birmanie pour un an.

Une fois qu'on a grimpé tout en haut, il n'y a plus qu'à descendre... 600m de dénivelé pour rejoindre un bateau qui traverse le Lac Inle jusqu'à Nyaungshwe. 


Catherine, le 18 mai 2005.


Note 84 Birmanie: Lac Inle
La région du Lac Inle est une des + riches. Les Inthas qui y habitent cultivent des tomates et des fraises sur des potagers flottants, des carrés de terre qu'ils découpent et arriment aux berges. Je fais un tour en bateau des petits métiers (forgeron, travail de l'argent, papier mâché, ...) et des échoppes pour toutous. Les rouleuses de cheerot font un cigare toutes les 10 sec. Dans les ateliers de tissage, on peut trouver des écharpes faites en fleur de lotus.
Au bord des rives, dans le "monastère des chats qui sautent", un moine fait faire une pirouette à un matou sacré."Hello, R U in charge of the cats?" "I am in charge of the tourits" Pas sure qu'ils soient aussi bien dressés.
Des femmes Palaung arrivent au marché, elles sont descendues des montagnes en camion, elles s'enroulent une serviette de bain sur la tête.
"Donnez-moi 2 piles et demi de piments, svp."

Les Birmanes sont belles, belles, belles ... toute en retenue, mystiques. Pourtant, elles se sont maquillées comme des poupées taiwanaises pour cette procession de pleine lune elles apportent des offrandes à Bouddha. Les + petites ont du rouge à lèvres écrabouillé tout autour de la bouche et du bleu sur les yeux. 

Teakwood house, Catherine, le 22 mai 2005.


Note 85 Birmanie: Kyaik-hti-yo, le roc sacré

23.05.2005 C'est tout un périple, Khyaik-hti-yo se mérite. A 190 km de Rangoon, le bus va être arrêté une multitude de fois par les militaires. Les moines et moi (la seule étrangère) restons dans le bus pendant que tous les voyageurs doivent descendre avec bagages et enfants pour passer les checkpoints à pied. Est ce du aux récents attentats ou parce que nous pénétrons en pleine zone Karen? Le long du chemin, je vois ces enfants esclaves (dont l'OIT a dénoncé le travail forcé) contraints à travailler sur une route en construction, cassant des pierres et portant des charges inhumaines, noirs, grillés par le soleil brûlant comme des sauterelles.

Les derniers km de montagne se parcourent à pied. Khyaik-hti-yo, c'est une grosse panse dorée qui se maintient en équilibre au bord d'un précipice de 1000m d'altitude. 3 costauds pourraient le renverser mais il tient à un cheveu ... de bouddha. Pour les Birmans, c'est un des sites les + sacrés de pèlerinage et un moment essentiel dans la vie de bouddhiste. Alors que je redescends avec le coucher du soleil, je croise une vieille dame courbée en 2 qui atteint le sommet après des heures de marche aidée d'un bâton et de ses proches. Elle restera sans doute dormir là-haut au milieu des nats (esprits protecteurs) et de milliers de petits cierges qui rendent les lieux encore + magiques.

Sea Sar, Camp de base, Catherine, le 22 mai 2005.


Note 86 Birmanie: Un pays enclavé

Le peuple vit dans un quotidien où l'oppression, la peur sont omniprésentes, en plus de la pauvreté. Et pourtant, la Birmanie est un pays qui déborde de vie et d'initiatives. Les rencontres comme celles que j'y ai faites valent tous les voyages du monde et ont le mérite de remettre certaines idées en place et me confortent dans ma conviction que je suis incroyablement chanceuse...

Catherine, le 23 mai 2005.


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